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« J’aime voir le chiot travailler dans un environnement inconnu »
Après avoir été d’abord famille d’accueil, Thierry Boucaud est devenu délégué en 2014 et surveille désormais la pré-éducation des chiots dans le Puy-de-Dôme, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Sa particularité : multiplier les périodes de rotation entre ses différentes familles d’accueil afin d’habituer les chiens aux environnements ruraux comme citadins.
HANDI’CHIENS : Depuis quand êtes-vous délégué familles d’accueil pour HANDI’CHIENS et comment l’êtes-vous devenu ?
Thierry BOUCAUD : Depuis 2014, mais j’étais déjà moi-même famille d’accueil depuis 2011. Je connaissais une bénéficiaire qui vivait à côté de chez moi, c’est elle qui m’a fait découvrir HANDI’CHIENS. J’ai une formation agricole, j’étais éleveur de chevaux et je pratiquais l’équitation en compétition. Mais j’ai connu des problèmes de santé, des problèmes cardiaques, et j’ai dû stopper la compétition. C’est à ce moment-là que je me suis lancé dans l’aventure HANDI’CHIENS. Je me suis occupé de la pré-éducation d’un chiot qui a été remis à une jeune personne autiste sujette aux crises d’épilepsie. Cela s’est super bien passé d’ailleurs, on reçoit encore régulièrement des nouvelles de la part des bénéficiaires, environ deux fois par semaine.
H. C. : Le chien n’est toujours pas à la retraite ?
T. B. : Non, non, elle est toujours active ! Elle a bien travaillé, et travaille toujours aussi bien. Ce sera compliqué à sa retraite pour les bénéficiaires, car l’enfant autiste avait entre huit et dix crises mensuelles, et avec le chien il est passé à cinq crises dont trois gérées par l’animal. Donc les parents qui se levaient la nuit dix à douze fois par mois se sont retrouvés à se lever seulement deux fois dès que le chien est arrivé.
H. C. : Ils ont donc reçu le chien en 2013 et vous êtes ensuite devenu délégué familles d’accueil…
T. B. : Voilà, le chien a été remis début 2013. On dépendait à l’époque du centre de Lyon et son responsable, que l’on appellerait aujourd’hui « éducateur référent », était également en charge de l’achat des chiens. Il était, en gros, dans un rôle quelque part entre celui de Maryse Peytavin (directrice technique) et celui de Clémence Lefort (responsable de l’achat des chiots et de la sélection). Il nous donnait des cours mais, sachant qu’on est à 200 kilomètres de Lyon, cela lui faisait quatre heures de route pour deux heures de formation. Il m’a confié qu’il lui fallait quelqu’un, dans notre groupe, pour devenir rapidement délégué. Au vu de mon expérience professionnelle et comme il avait déjà eu l’occasion de m’apprendre comment fonctionnait HANDI’CHIENS, il m’a demandé de suivre les cours pour devenir délégué. Ce que je suis devenu en 2014.
H. C. : Avec le contexte sanitaire actuel, comment ça se passe d’être délégué familles d’accueil en mai 2021 ?
T. B. : Ah, c’est compliqué ! Je dispensais mes cours à Clermont-Ferrand, à 50 kilomètres de chez moi, au sein d’une école vétérinaire qui a cessé de mettre à disposition ses locaux avec la crise. On s’est retrouvé sans local mais, étant très impliqué dans la vie de ma commune, j’ai pu en retrouver un tout près de chez moi. Sauf que du coup, les familles d’accueil faisaient plus de trajet que moi alors qu’auparavant c’était l’inverse. Alors j’ai réparti mes cours en deux équipes, avec l’une d’elle à Clermont-Ferrand et l’autre près de chez moi, en fonction de leur situation géographique. C’était un petit peu plus compliqué mais on a la chance d’habiter à la campagne donc j’ai toujours pu faire les cours en présentiel. On s’adapte, on peut faire des sorties. J’aime voir la famille d’accueil travailler avec le chiot dans un lieu plutôt inconnu. Car quand on se retrouve tous les quinze jours dans le même local, le chien ne réagit pas pareil, vis-à-vis du lieu comme des autres chiots, que lorsqu’il est entre guillemets lâché dans la nature.
H. C. : Donc vous dispensez vos cours à chaque fois dans un endroit différent ?
T. B. : C’est cela. On a un rendez-vous en extérieur au moins une fois par mois où je vais soit axer le cours sur la communication, soit sur le côté commercial. Quand je dis « commercial », c’est parce qu’il est important d’essayer de récolter un maximum de dons et de trouver des partenariats pour avoir une autonomie financière. Je dirais aussi qu’on a deux casquettes quand on est délégué familles d’accueil. On a d’abord la « casquette apprentissage des chiens », c’est-à-dire l’éducation canine où il faut avoir une formation d’éducateur. Mais on s’est aperçu aussi que pour la plupart des délégués, la gestion des familles d’accueil s’avérait parfois plus difficile que la gestion des chiens. Cette « casquette management » n’est pas évidente. Pour moi, c’est un peu plus simple car au cours de ma carrière professionnelle j’ai été contremaître et je gérais une centaine de personnes, donc cette partie management ne m’a pas posé de problème. Mais c’est très important pour les délégués qui débutent et ceux qui ont des familles parfois compliquées.
« J’effectue au moins sept rotations par cycle »
H. C. : Combien de familles d’accueil gérez-vous ?
T. B. : Cela varie, ça peut être quatre, six… Aujourd’hui j’en ai quatre, car l’une de mes anciennes familles d’accueil est elle aussi devenu déléguée, donc elle a pris en charge une partie de mon groupe cette année. Car c’était son premier groupe. Dès l’année prochaine on va avoir chacun un groupe complet.
H. C. : Vous êtes donc deux délégués familles d’accueil sur votre secteur ?
T. B. : Deux délégués pour neuf chiens oui. Enfin là j’avais quatre chiens mais je n’en ai plus que trois. C’est la première fois que cela m’arrive mais malheureusement l’un d’eux a fait une péritonite. Mes parents étaient agriculteurs et on avait des troupeaux laitiers, mais je n’avais jamais connu cela. Mais ça arrive, malheureusement. Il était très prometteur. Ce qui est dommage, c’est qu’il était sur le point d’entrer en centre, puisque nos chiens y entreront la semaine prochaine.
H. C. : Gérez-vous vos familles d’accueil globalement de la même façon ou différemment selon leurs spécificités ?
T. B. : J’ai un mode de management plutôt particulier. Mes familles d’accueil sont complètement différentes les unes des autres. Cela va de la famille qui a cinq enfants et vit à la campagne, à la famille qui vit à Clermont-Ferrand, intra-muros, dans un petit studio et qui est obligé de se déplacer chaque jour avec le tramway. Pour améliorer l’apprentissage des chiens, j’effectue beaucoup de rotations. Au moins sept dans mon cycle de seize mois.
H. C. : Une rotation ? C’est-à-dire ?
T. B. : En fait, une rotation, c’est échanger les chiens entre les familles. Dans le cycle de seize mois, HANDI’CHIENS nous en conseille trois. On échange les chiens pendant deux, trois semaines, et ça permet aux délégués d’avoir un point de vue nouveau sur les chiens. Les défauts constatés au sein d’une famille ne le seront pas forcément au sein d’une autre, et ça nous permettra de comprendre que le problème vient peut-être de l’environnement par exemple. Je trouve cela intéressant car du fait de la disparité entre mes familles, le chien sera valorisé car il va vivre beaucoup de choses. Cela peut permettre également de mieux savoir à quel type de bénéficiaire il va davantage convenir.
H. C. : Que se passe-t-il à la fin de ces rotations ?
T. B. : Le chien retourne tout simplement chez sa famille référente. C’est pour cela que je parle de familles référentes et de familles d’accueil, car j’effectue beaucoup de rotations. La famille référente est celle qui est responsable du chien, physiquement et moralement. J’essaie d’avoir au minimum un groupe de cinq familles d’accueil. Un chiffre impair, c’est bien. Bien sûr, les rotations sont au service de la formation des chiens. Je prends le cas extrême : j’habite à la campagne et dans ma cour, juste devant ma porte d’entrée, il y a des canards, des lapins, des poules, des pigeons, des poneys et même, 100 mètres plus loin, des chevaux. Il faut que le chien apprenne à vivre avec tout cela. Puis quand il est chez une de mes familles qui se trouve en ville, il va descendre tous les jours par l’ascenseur, il va prendre les transports en commun, etc. Donc je vais demander à la famille d’accueil de travailler tout ce qui concerne la vie en ville : la marche en laisse, les besoins sur le goudron… Alors que chez moi, il aura travaillé sur la partie sociabilisation en milieu animal. Les rotations permettent cela. Les chiens dont je m’occupe ont la réputation d’être hyper calmes, posés. Mais c’est normal, ils voient tellement de choses !
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